Le 100 km de Saint-Pierre-des-Corps |
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Quel est le marcheur Audax qui ne connaît pas « La Godasse » ? Association sportive créée en 1973 qui a adhéré à l'U.A.F. en 1984. Quel chemin parcouru depuis ! Ce 26 février 2000, après le 200 kilomètres mémorable de mai 1995, c'est sa centième épreuve. Après les brevets de 25, 50 et 75 km, tous les ingrédients sont réunis pour que ce 100 km se déroule à la satisfaction de tous. Au pied de l'escalier métallique situé sur le côté de la superbe salle des fêtes, Jean-Marc Faucheux, président depuis l'année dernière, nous réserve le meilleur accueil. A 13 h 30 la salle est déjà pleine. Nos amis belges, allemands et hollandais au nombre de neuf, partis de bon matin, regroupés dans le fond, reprennent des forces, ouvrant boîtes et bouteilles, ne donnant aucune chance aux sandwichs précieusement disposés dans les sacs. Ils sont copiés par d'autres courageux marcheurs venus de toutes les régions de France. Est, Sud-Est, Midi, Sud-Ouest, Ouest, Centre... Sept Bretons sont là et une dizaine de « Parisiens » venus par le TGV. Parmi eux, quelques-uns viennent de rechausser leurs trainings et s'apprêtent à reprendre leur pied après une brève hibernation et avoir mis de côté les longues distances en attendant le retour des beaux jours. Cela ne fait aucun doute, nous sommes tous attirés par la vie au grand air. « Prends soin de ton corps pour que ton âme ait envie de l'habiter », dit la sagesse orientale. Accompagné par Michel Daviot, Maurice Pradal, Serge Bureau, Yves Ricordeau et Jean-Claude Courcy de l'Amicale des Marcheurs Indépendants de Bois-d'Arcy, je me fraie tant bien que mal un passage jusqu'à la table des inscriptions. Je salue Pierre Brialix, le trésorier, et le courtois André Fanzera, toujours prêt à rendre service. J'en profite pour lui demander la liste des bénévoles qui seront, en plus des personnes susnommées, Michèle Torel, Martine Brossard, Abrundie Garcia, Philippe Vaucelle et Bernard Fremond. Derrière, avec la Croix-Rouge, Jean Falquet veillera sur notre sécurité. – Bonjour Paul, Antoine, André. Tiens ! René, comment vas-tu ? Quand comptes-tu revenir en Belgique ? – Hello Jeannette ! Hello Franck ! A quelle heure êtes-vous partis ? – A quatre heures. Il y avait du brouillard. – Ah ! – Serge, quelle bonne surprise, après Saverdun, si je m'attendais à te voir ! – Eh moi, alors ! Le week-end dernier, j'étais aussi à Romorantin. Levé à 5 heures du matin, j'ai éclaté un pneu sur la route et ai dû trouver un garagiste. Quelle aventure ! – Et vous les amis Paul et Claude, chargés comme si vous partiez en vacances. Ça va bien ! – Tu vois, c'est reparti. Rémy Pajot me tapote amicalement sur l'épaule et me met au courant de sa glissade malencontreuse survenue au 75 de Lhomme. Madeleine, Corpopé-trussienne, habitant donc à Saint-Pierre-des-Corps, arrive à son tour, dans une super forme qu'elle gardera de bout en bout, se tenant constamment derrière les capitaines de route. Il faut croire que la marche possède des vertus bénéfiques. Je fais la connaissance de Christian Pelletier, un ancien, un de plus. Il s'est arrêté de marcher en 1986 ayant fait trois Aigles, le premier 200 km de Mantes-la-Jolie, le mont Ventoux et Paris-Colmar avec Baudouin sous la forme de Flèche. Il envisage en 2002 d'organiser un 100 km à La Caillère (Vendée) avec les Pieds Z'Ailés des Herbiers. Les consignes de sécurité étant données, à 14 h 30, 182 pieds emboîtent ceux avertis de Gérard Rouberty et d'Albert Claramonte. Gérard, surnommé Babu, est un « champion hors normes ». Son palmarès, tant à vélo qu'à la marche, est époustouflant. Ce modèle sensible, généreux et profondément modeste, à ma connaissance, ne se fait plus. Il connaît très bien la montagne, les Pyrénées, les Alpes surtout et la Touraine, bien sûr, comme sa poche. Il devrait bientôt terminer son trentième Aigle d'or. S'en suivra le bouclage du tour de France commencé il y a quelques années dans lequel il ne lui reste plus que deux fractions à réaliser. Chapeau bas vraiment à ce solide pilier barbu de La Godasse. Le temps est printanier, le soleil discret. Le short n'a pas encore été adopté. La boucle, comme tous les parcours, a été tracée par Gérard. Très agréable et roulante avec un léger relief, celle-ci n'ira pas à la rencontre des fascinants châteaux de la Renaissance bâtis à l'italienne à Amboise, Azay-le-Rideau, Chenonceaux où Chambord, pour ne citer que ceux-ci. Nous passons sous le pont de l'A10 pour longer le Cher, rejoignant la Loire à proximité de Tours. Regorgeant d'eau, son cours est tranquille. A 15 h 10, le TGV fonce à toute pompe vers Bordeaux. Par analogie, le canard sauvage pressé d'amerrir qui survole l'anguille, indifférente, se la coulant douce. A gauche, une vue féerique s'offre sur un bras d'eau de couleur turquoise. Dans la croquignolette île, nous foulons la terre du parc Honoré de Balzac, au plein cœur de la Touraine. Coquettes, des pies jasent en sautillant sur l'herbe verte clairsemée de pâquerettes et des premières jonquilles. Apparaissent ensuite le parc animalier, le plan d'eau artificiel et son école de voile. Au bord d'un ruisseau dans lequel deux pêcheurs trempent leurs lignes, une salade de fruits, des parts de quatre-quarts et des boissons nous sont servis. Nous entreprenons ensuite la première côte à 12 % qui éparpille les moins entraînés et nous arrêtons une heure après, en campagne céréalière. Un petit sentier bordé d'un côté de pins et de l'autre d'un plan d'eau dans lequel se reflètent de jolies maisons est emprunté. A 18 h 23, la halte de quinze minutes au stade de Monts permet de se désaltérer et de grignoter un morceau. Paré de mon baudrier fluorescent jaune, de service depuis quinze ans, ma lampe de poche à la main, non d'origine, celle-ci devant être la dixième, je me confonds au peloton et me voilà à côté de Marie-Claude Chirat. Fascinée de marche athlétique, en 1998 et 1999, elle s'est classée cinquième de Paris-Colmar, améliorant son temps de plus de deux heures. Cette année, elle s'accorde un break et à son tour, accompagnera un maître du macadam. Sa prochaine épreuve, le 200 km sélectif de Perpignan les 11 et 12 mars. Champion ! Nous enjambons le petit pont sur l'Indre et assistons sur le plateau à un coucher de soleil magnifique. Le ciel s'étant dévoilé, il laisse voir de petits nuages floconneux sur toile de fond pourpre, rose-bleu clair. Vers 20 heures, il sera étoilé en totalité. Dans un enclos, des véhicules de l'armée de la dernière guerre mondiale sont parqués là, attendant on ne sait quoi. Sur le bas-côté, ne passant pas inaperçu non plus, se morfond un hélicoptère Sikorski. Plus gais et entreprenants, des rayons laser multicolores de grande portée balaient le ciel dans tous les sens. C'est le signal d'une boîte de nuit distante de dix kilomètres, pas de la salle des fêtes de Saint-Epain où, à 22 h 10, nous nous arrêtons une heure. Tout en s'alimentant, chacun pare à sa manière au plus urgent : changement de maillot, confort des pieds, toilette, ronflette... Vite ! Avant la « sifflette » de Gérard, le regard sur son chrono. Remontant sur Tours, le serpentin aux couleurs bariolées reprend son élan et se dirige maintenant vers l'école communale de Villeperdue. L'imposante église romane bien mise en valeur est de toute beauté. A 1 h 07, l'accès aux sacs permet de remettre un vêtement en prévision du brouillard épais qui refroidit les dos. Au musée Jean Dufresne sont exposées des vieilleries (ferrailles, machines agricoles, engins de guerre mis au rebut...). Passé Sorigny, le croissant de lune au centre d'une sphère bleutée opaque à vision humaine de deux mètres de diamètre, illumine la nature endormie. Rarissime extraordinaire. Des routes éclairées rectilignes nous mènent à la mairie de Saint-Branchs pour une pause de dix minutes, face à la chapelle Notre-Dame-de-Lorette. A 5 h 22, nous nous réjouissons du petit déjeuner pain frais, beurre, confiture pris à la salle des fêtes de Veigne. A 6 heures, au grand moulin restauré feignant toujours de régner sur l'Indre, il ne restera plus que 23,8 km à parcourir. Çà devient bon. Albert m'apprendra qu'une cressonnerie dessert les grandes surfaces de Tours. Le cresson est récolté dans l'eau douce d'un ruisseau alimenté par une source. Un cocorico, puis un second plus lointain. Il est 6 h 45, la campagne s'éveille. Les oiseaux commencent à gazouiller, le lever du jour est imminent. Il fera beau et chaud. Ayant hâte d'arriver, je saute les trois derniers arrêts ravitaillement et la piste de l'hippodrome entrevue à Chambray pour vous retrouver au lac des Peuplerai dans le parc Honoré de Balzac où ça marchera cool, puis enfin à Saint-Pierre-des-Corps. A 10 h 30, les tables sont garnies de petits gâteaux secs et de bouteilles de crémant d'Anjou. Jean-Marc Faucheux remercie les participants, la sécurité, les capitaines de route, toutes les personnes bénévoles qui ont fait preuve de complaisance et de savoir ainsi que les nombreuses municipalités pour l'aide précieuse apportée. Des coupes sont remises à Jacques Paul (ler Aigle d'or), Garcia Léo (3e) et Jean-Jacques Caron (4e). Baudouin Rossius félicite « La Godasse » pour cet excellent brevet et remet l'Aiglon à l'ami creusois Jean-Philippe Chassagne qui a décroché son 5e Aigle d'or. Avant de reprendre la route du retour, le verre de l'amitié est pris tous ensemble avec l'envie de bientôt se revoir. René VASSEUR, A.M.I. Bois-d'Arcy. |